En réponse aux arrêts de la Cour de cassation du 13 septembre dernier, la loi n°2024-364 du 22 avril 2024 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne a définitivement été adoptée, et promulguée au Journal officiel du 23 avril 2024.
Les dispositions qu’elle prévoit et plus particulièrement celles de l’article 37 relatif aux droits à congés payés pendant un arrêt maladie, entrent en vigueur à compter du 24 avril 2024. En effet, le Conseil constitutionnel n’a pas été saisi.
Fortify fait le point sur les changement apportés par cette nouvelle législation.
Congés payés et arrêt maladie : ce qu’il faut retenir
- Désormais, les travailleurs bénéficient d’une acquisition de 2.5 jours ouvrables par mois pour les accidents du travail ou les maladies professionnelles. Pour les arrêts maladie courants, cette acquisition est fixée à 2 jours ouvrables par mois.
- Un délai maximum de report des congés payés a été instauré, fixé à 15 mois avec rétroactivité. Cela signifie que les employés ont la possibilité de reporter leurs congés non pris sur une période maximale de 15 mois, avec la garantie de récupérer ces droits antérieurs.
- De plus, un délai de forclusion de 2 ans à partir de la publication de la loi a été établi. Au-delà de cette période, les salariés ne pourront plus revendiquer des rappels de congés payés antérieurs.
- Une nouvelle obligation incombant aux employeurs consiste à informer les salariés de retour d’arrêt maladie dans un délai d’un mois sur leurs droits à congés. Cette information doit être transmise par tout moyen conférant une date certaine à sa réception, notamment par le biais du bulletin de paie.
Calcul de l’indemnité
Pour rappel, l’indemnité de congés payés doit se calculer de la façon la plus favorable au salarié entre :
- le 1/10e de la rémunération totale brute de référence sur la période d’acquisition (en général, du 1er juin au 31 mai) ;
- le maintien du salaire.
Ce qui change pour la règle du 1/10e :
La rémunération fictive correspondant aux périodes d’arrêt maladie n’est prise en compte qu’à hauteur de 80 % (contre 100 % pour un AT/MP par exemple)
Tableau récapitulatif
Travail effectif | Accident ou maladie à caractère non professionnel | Accident ou maladie à caractère professionnel | |
Condition d’ouverture du droit | Aucune | Aucune | Aucune |
Règle d’acquisition | 2,5 jours par mois | 2 jours par mois | 2,5 jours ouvrables par mois |
Droit maximum légal par période d’acquisition | 30 jours ouvrables |
• 24 jours ouvrables au titre des arrêts pour accident ou maladie non professionnelle • Possibilité d’acquérir plus de 24 jours ouvrables si l’arrêt maladie ne couvre pas la totalité de la période d’acquisition |
30 jours ouvrables |
Congés payés après un an d’arrêt pour AT/MP : un changement majeur en novembre 2024
Dans un arrêt rendu le 2 octobre 2024 (n° 23-14.806), la Cour de cassation a statué qu’en raison des principes du droit européen, les salariés peuvent revendiquer des congés payés pour les périodes d’arrêt excédant un an, même pour des arrêts ayant eu lieu avant la loi du 24 avril 2024.
Cette décision repose sur la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui garantit le droit aux congés payés sans condition de durée d’arrêt, et qui prime sur les limitations prévues par le code du travail français. Ainsi, bien que la loi de 2024 ait voulu mettre fin à cette distinction, la Cour de cassation a décidé d’ouvrir la voie à une application rétroactive indirecte du droit à congés payés, permettant aux salariés de réclamer des droits pour des périodes antérieures à la loi de 2024.
En pratique :
Les salariés en arrêt pour AT/MP peuvent désormais demander des congés payés pour tous les arrêts excédant un an, même avant le 24 avril 2024, grâce à cette jurisprudence. Cela signifie que, malgré la loi de 2024, les employeurs doivent être prêts à gérer des demandes de congés payés pour des périodes antérieures à la réforme, en s’appuyant sur la décision de la Cour de cassation.
Quelles implications pour les employeurs ?
Cette décision pourrait avoir des conséquences importantes pour les employeurs, notamment en termes de gestion des droits des salariés et d’expositions financières possibles. Les entreprises devront probablement ajuster leurs pratiques pour prendre en compte cette jurisprudence et éviter d’éventuelles réclamations de congés payés pour des périodes antérieures à la loi, notamment en cas d’AT/MP de longue durée. Toutefois, elles peuvent se reposer sur des mesures de limitation des effets de cette rétroactivité, comme prévu dans la loi de 2024, pour réduire l’impact financier.
En bref
La Cour de cassation a reconnu le droit des salariés à l’acquisition de congés payés pour des arrêts AT/MP excédant un an, même pour des périodes antérieures à la réforme de 2024. Cette évolution juridique marque une avancée importante pour les droits des salariés, mais impose aux employeurs de s’adapter rapidement à cette nouvelle règle.