Face à un déficit public qui dépasse les 5 % du PIB, le gouvernement de François Bayrou a annoncé un plan d’économies ambitieux de 43,8 milliards d’euros pour l’année 2026. Ce budget s’inscrit dans une stratégie de retour à l’équilibre budgétaire d’ici 2029, avec une volonté affichée : réduire les dépenses publiques tout en relançant la production par le travail.
Mais derrière les chiffres, ce sont des mesures sociales, fiscales et économiques concrètes qui auront un impact direct sur les entreprises, les salariés et les ménages. Voici les principales mesures à retenir.
Une « année blanche » : gel des barèmes et perte de pouvoir d’achat
Le terme est fort, mais il traduit bien la réalité du Budget 2026 : aucune mesure de revalorisation pour les citoyens. En pratique, cela signifie :
- Pas de revalorisation des retraites, malgré l’inflation
- Gel du barème de l’impôt sur le revenu, ce qui revient à une hausse d’impôt déguisée pour les ménages dont les salaires augmentent
- Maintien des seuils de la CSG/CRDS et de certains minima sociaux à leur niveau actuel
Cette politique vise à freiner l’augmentation mécanique des dépenses publiques, mais elle risque d’engendrer une baisse du pouvoir d’achat, en particulier pour les classes moyennes et les retraités.
Suppression de jours fériés : vers une hausse du temps de travail effectif
Parmi les mesures les plus marquantes : la suppression de deux jours fériés. Le gouvernement avance plusieurs arguments :
- Accroître le nombre de jours réellement travaillés pour stimuler la croissance
- Favoriser une hausse de la productivité nationale
- Réaffirmer une culture de l’effort dans un contexte économique contraint
Des jours fériés symboliques sont dans le viseur : le lundi de Pâques ou le 8 mai. Une contribution patronale serait envisagée en compensation, mais son périmètre reste à définir.
Cette annonce divise profondément : rejet massif des syndicats, réticences côté employeurs, et interrogation sur l’impact réel sur la croissance.
Coup de frein sur les dépenses de santé : ce qui va changer
La maîtrise des dépenses de santé constitue un autre axe fort du budget. Le gouvernement prévoit :
- Un doublement du plafond des franchises médicales (de 50 € à 100 € par an), supporté par les patients
- Une réforme du régime des affections longue durée (ALD), avec une possible réduction des exonérations
- Un assouplissement des visites de reprise après un arrêt maladie, pour faciliter les retours à l’emploi
- Une révision du mode de calcul des indemnités journalières, pouvant se traduire par un transfert de charge vers les entreprises
Ces mesures visent à réduire le coût de l’Assurance maladie, mais suscitent déjà de vives inquiétudes dans le monde médical comme dans le tissu entrepreneurial.
Réforme de l’assurance chômage et encadrement des ruptures conventionnelles
Prévue pour fin 2025, la réforme de l’assurance chômage pourrait transformer en profondeur les droits des demandeurs d’emploi :
- Conditions d’éligibilité plus strictes, notamment en matière de durée d’activité minimale
- Réduction de la durée d’indemnisation, dans une logique d’activation des droits
- Encadrement renforcé des ruptures conventionnelles, jugées trop souvent utilisées pour éviter un licenciement ou contourner une démission
L’objectif est clair : mieux inciter au retour à l’emploi, tout en préservant les finances de l’UNEDIC.
Une négociation sociale nationale sera lancée dès la rentrée 2025, avec l’ambition d’aboutir à un accord avant fin décembre.
Modernisation du marché du travail : vers plus de flexibilité
Autre pilier de la stratégie du gouvernement : adapter le droit du travail aux réalités du terrain et aux attentes des entreprises :
- Assouplissement du recours aux contrats courts : CDD, CDI de chantier, intérimaires
- Réduction des délais de contestation pour les ruptures de contrat (prud’hommes)
- Proposition de monétisation de la 5e semaine de congés payés, pour offrir plus de liberté… et augmenter le temps de travail effectif
- Incitation à travailler plus longtemps, notamment via des mesures sur les retraites complémentaires
Si ces mesures peuvent séduire certaines entreprises, elles sont aussi perçues comme un risque de dégradation des droits sociaux, notamment pour les salariés les plus précaires.
Qualité de vie au travail : les contreparties sociales
Pour contrebalancer ces réformes perçues comme libérales, le gouvernement promet des avancées sur le terrain de la qualité du travail :
- Lutte contre le temps partiel subi, notamment dans la grande distribution ou les services à la personne
- Prévention des accidents du travail, avec un plan ciblé sur les métiers à forte sinistralité
- Renforcement du dialogue social dans les TPE/PME, encore souvent peu structuré
- Amélioration de la gouvernance sociale, via une meilleure représentation des salariés dans les instances de direction
Ces mesures visent à réconcilier compétitivité et conditions de travail, avec un accent mis sur les PME.
Les autres réformes à suivre en 2026
Le Budget 2026 s’accompagne d’un certain nombre de réformes transversales qui seront discutées tout au long de l’année :
- Création d’une Allocation Sociale Unifiée (ASU), pour regrouper plusieurs aides et simplifier l’accès aux droits
- Nouvelles mesures sur les retraites, avec des volets « pénibilité » et « égalité femmes-hommes »
- Un projet de loi contre la fraude sociale et fiscale, attendu pour l’automne 2025
- Une réforme du complément de mode de garde et du congé de naissance, pour favoriser l’emploi des femmes
Ces chantiers s’inscrivent dans une vision globale de transformation de l’État social, mais leur mise en œuvre dépendra des rapports de force sociaux et parlementaires.
Une rentrée sociale 2025 sous haute tension
Deux grandes négociations sociales doivent s’ouvrir dès la rentrée 2025 :
- Assurance chômage
- Marché de l’emploi et qualité du travail
Les premières lettres de cadrage seront envoyées fin juillet/début août.
Le gouvernement souhaite aboutir à des accords d’ici la fin de l’année, avant de traduire les mesures dans la loi.
Mais l’adoption effective de ces réformes reste incertaine, tant les résistances sont nombreuses. La rentrée sociale s’annonce particulièrement tendue, et chaque mesure pourrait évoluer ou être modifiée au fil des négociations.