Annoncé à l’automne 2024 puis mis en veille suite à la censure du Gouvernement Barnier, le décret actant l’abaissement du plafond des revenus pris en compte pour le calcul des IJSS a été finalement publié. À partir du 1er avril 2025, celui-ci passera de 1,8 à 1,4 SMIC mensuel. Retour sur une évolution réglementaire qui ne sera pas sans incidence pour les entreprises, leurs salariés et les organismes de prévoyance.

Revenu servant de base au calcul des IJSS : il ne peut excéder un certain plafond

Pour rappel, les salariés ayant suffisamment travaillé ou cotisé peuvent percevoir, en cas d’arrêt maladie, des indemnités journalières versées par la Sécurité sociale (IJSS). Leur montant correspond alors à 50 % du salaire journalier de base (SJB) du salarié, lui-même égal, lorsque ce dernier est mensualisé, à 1/91,25 du montant des 3 dernières paies des mois civils antérieurs à la date de l’interruption de travail.

Le Code de la Sécurité sociale plafonne par ailleurs les revenus à prendre en considération. Aussi, pour tous les arrêts de travail prescrits jusqu’au 31 mars 2025, ce plafond s’établira à 1,8 fois la valeur du SMIC mensuel en vigueur au dernier jour du mois civil précédant celui de l’interruption de travail. Etant précisé que la valeur du SMIC mensuel a été revalorisée à 1 801,80 € en novembre 2024.

Illustration

Si un arrêt de travail débute au 15 février 2025, le plafond des revenus pris en compte se situera à 3 243,24 € (1,8 x 1 801,80) et plafonnera, par ricochet :

  • Le SJB à 106,63 € (3 243,24 x 3/91,25) ;
  • Et les IJSS à 53,31 € (50 % du SJB maximal).

Mais à partir du 1er avril 2025, ce plafond va évoluer à la baisse.

Revenu servant de base au calcul des IJSS : abaissé à 1,4 SMIC à partir du 1er avril 2025

Ce basculement n’a rien d’une surprise. Rappelez-vous. En octobre 2024, la ministre du Travail de l’époque, Astrid Panosyan-Bouvet, avait annoncé, en marge de la présentation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2025, que le Gouvernement aspirait à abaisser le plafond des revenus servant de base au calcul des IJSS.

Face à l’envolée des dépenses liées aux indemnités journalières, l’exécutif entendait plus précisément ramener ce plafond à 1,4 SMIC mensuel, soit 2 522,52 €, et donc réduire le SJB maximal à 82,93 € et le montant maximal des indemnités journalières à 41,47 €.

Une mesure qui, à l’échelle des entreprises et des salariés, pourrait induire :

  • Une baisse du niveau d’indemnisation du salarié si celui-ci ne peut pas prétendre au versement d’une indemnité complémentaire patronale ;
  • Une augmentation du niveau de prise en charge patronale lorsque celui-ci doit maintenir, totalement ou partiellement, le salaire du salarié ;
  • Une augmentation des cotisations versées par les employeurs à leur organisme de prévoyance.

Les impacts de la réforme

Ce qui va changer pour les salariés

La réduction du plafond aura un impact direct sur les indemnités journalières des salariés gagnant plus de 1,4 SMIC. Par exemple, pour un salarié dont le salaire est de 3 000 €, ses IJSS seront désormais plafonnées à 41,47 € par jour, soit bien moins que les 53,31 € qu’il aurait perçus avant la réforme. Cette baisse pourra entraîner une perte significative de revenu, en particulier pour les salariés qui ne bénéficient pas d’un maintien de salaire de la part de leur employeur (ancienneté insuffisante, absence de complémentaire entreprise).

Les conséquences pour les employeurs

  • Augmentation du coût du maintien de salaire :
    Les employeurs devront compenser la baisse des IJSS lorsque le maintien de rémunération est prévu par le code du travail ou les conventions collectives. Cela pourrait entraîner un surcoût pour les entreprises, particulièrement pour celles qui maintiennent une partie du salaire des employés en arrêt maladie.
  • Recours plus fréquent aux contrôles médicaux :
    Pour limiter les coûts liés aux arrêts maladie, les entreprises pourraient recourir plus fréquemment à la contre-visite médicale patronale. Cela permettrait de contrôler les arrêts injustifiés et de s’assurer que les arrêts de travail sont bien conformes à la réalité.

L’impact sur la prévoyance complémentaire

Révision des garanties et cotisations :
La réduction du plafond des IJSS pourrait affecter les contrats de prévoyance, entraînant une possible augmentation des cotisations salariales et patronales pour garantir un même niveau d’indemnisation. Les employeurs devront peut-être ajuster leurs contrats de prévoyance pour compenser cette baisse, ce qui pourrait entraîner une hausse des coûts pour les entreprises.

Une réforme à anticiper pour les entreprises

Si la réforme des IJSS vise à maîtriser les coûts de la Sécurité sociale, elle risque également de créer des tensions pour les employeurs et les salariés. D’un côté, les entreprises pourraient devoir assumer une augmentation des coûts liés à la couverture des arrêts maladie, mais de l’autre, les salariés risquent de voir leurs indemnités journalières baisser, ce qui pourrait affecter leur pouvoir d’achat.

Les préparations à faire pour les entreprises

Les entreprises doivent dès à présent se préparer à cette réforme, qui entrera en vigueur le 1er avril 2025. Il sera essentiel de :

  • Réévaluer les contrats de prévoyance et ajuster les garanties pour compenser la baisse des IJSS ;
  • Auditer les politiques internes de gestion de l’absentéisme et des arrêts maladie pour minimiser les coûts supplémentaires ;
  • Mettre en place une communication claire avec les salariés concernant les nouvelles indemnités journalières et l’impact sur leurs revenus en cas d’arrêt de travail.

Les entreprises doivent également se tenir informées des évolutions législatives et adapter leur stratégie en conséquence.

Conclusion

La réforme des IJSS représente un changement significatif pour les entreprises et leurs salariés. Bien que l’objectif soit de contrôler les dépenses publiques liées aux arrêts maladie, cette mesure entraînera des coûts supplémentaires pour les employeurs et une réduction du niveau d’indemnisation pour certains salariés. L’anticipation et la révision des contrats de prévoyance et des politiques de gestion des arrêts maladie seront essentielles pour faire face à cette réforme dès le 1er avril 2025.

Pour plus de détails, vous pouvez consulter le décret au Journal Officiel du 21 février 2025 ici.