À partir du 1er juillet 2025, les employeurs devront se conformer à un nouveau cadre réglementaire visant à protéger les salariés face aux épisodes de canicule au travail. Ce décret du 27 mai 2025, publié au Journal officiel le 1er juin, impose des mesures concrètes et contraignantes dès le niveau jaune de vigilance Météo-France. Fortify fait le point sur ces nouvelles obligations.
Canicule au travail : un enjeu de santé publique
Avec le réchauffement climatique, les épisodes de fortes chaleurs deviennent plus fréquents, plus précoces et plus intenses.
Avec des pics de chaleur dépassant les 30 °C dès la fin mai, le printemps 2025 a été l’un des plus chauds en France depuis 1900, selon Météo-France. Cette tendance se confirme d’année en année, rendant indispensable l’adaptation des conditions de travail.
Face à cette intensification des vagues de chaleur, le gouvernement entend limiter les accidents du travail et protéger la santé des salariés.
Bon à savoir : la nouvelle réglementation concerne l’ensemble des personnes exposées, y compris les indépendants (agriculteurs, artisans, sous-traitants…). Les plans de prévention des entreprises doivent inclure tous les intervenants concernés par les épisodes de chaleur.
Quelles sont les nouvelles obligations des employeurs en cas de canicule ?
Le décret impose des adaptations immédiates de l’organisation du travail dès l’alerte jaune canicule. Les mesures suivantes deviennent obligatoires :
1. Organisation du temps de travail adaptée
- Mise en place d’horaires décalés pour éviter les pics de chaleur
- Suspension temporaire des tâches pénibles
- Allongement des temps de repos pendant les heures les plus chaudes
2. Accès à l’eau renforcé
- En l’absence d’eau courante, l’employeur doit fournir au moins 3 litres d’eau fraîche par salarié et par jour
- L’eau doit être conservée au frais et facilement accessible à proximité des postes de travail.
3. Équipements de protection adaptés
- Vêtements respirants, couvre-chefs et lunettes filtrantes deviennent obligatoires.
- Une attention particulière est exigée pour les femmes enceintes et les salariés vulnérables.
4. Aménagement des postes de travail
- Utilisation de ventilateurs, brumisateurs, pare-soleil
- Mise en place de zones d’ombre et de ventilation pour les postes en extérieur
5. Intégration dans le DUERP
À compter du 1er juillet 2025, le risque chaleur devra obligatoirement figurer dans le Document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). Cette intégration doit s’accompagner :
- d’un plan d’action précis
- d’une formation des équipes à la reconnaissance des signes de coup de chaleur (fièvre, maux de tête, vertiges, crampes musculaires…)
- de protocoles de secours spécifiques à chaque site, y compris pour les travailleurs isolés
Points spécifiques pour le secteur du BTP
Le secteur du BTP, particulièrement exposé, fait l’objet de dispositions spécifiques :
- Le dispositif de chômage-intempéries, élargi en 2024, reconnaît désormais la canicule comme motif légitime dès le niveau de vigilance orange (arrêté du 27 mai 2025). Cela clarifie un point jusque-là flou dans les précédents textes.
- L’accès à l’eau potable fraîche y est renforcé : elle doit être disponible en continu, sans aucune limitation.
Les employeurs doivent anticiper dès maintenant l’intégration de ces mesures dans leur organisation pour garantir la sécurité des salariés.
Des contrôles renforcés dès 2025
Les obligations ne sont pas simplement incitatives : l’Inspection du travail dispose d’un pouvoir de contrôle renforcé. En cas de manquement, elle pourra :
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Mettre en demeure l’employeur d’agir dans un délai de 8 jours
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Suspendre l’activité en cas de danger avéré pour les salariés
En 2024, 1 500 contrôles ont été réalisés, principalement dans les secteurs du BTP, de l’agriculture et de la restauration. Ces contrôles seront intensifiés dès l’entrée en vigueur du décret.
Pourquoi cette réforme est essentielle ?
La canicule n’est plus une exception, mais une réalité climatique récurrente. En 2024, sept décès liés à la chaleur ont été recensés sur le lieu de travail en France. Et ces chiffres pourraient augmenter si rien n’est fait. La chaleur extrême représente un risque immédiat pour la santé : épuisement, déshydratation, coups de chaleur… mais aussi des accidents indirects liés à la baisse de vigilance, aux malaises ou à la fatigue.
Cette réforme vise à changer de paradigme : il ne s’agit plus simplement de « s’adapter sur le moment », mais de prévenir, anticiper, structurer une réponse collective au risque canicule. En inscrivant ces obligations dans le Code du travail, l’État envoie un signal fort : la protection des salariés face aux dérèglements climatiques devient une priorité légale et opérationnelle.