La Directive Européenne 2023/970 du 10 mai 2023 vise à renforcer l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes pour un même travail ou un travail de même valeur, grâce à une transparence des rémunérations.
La France bénéficie d’un délai jusqu’au 7 juin 2026 pour transposer cette Directive Européenne dont les mesures visent à améliorer la visibilité sur les écarts de rémunération.
Concrètement, les entreprises devront être capables de justifier leur décision en matière de rémunération.
Il est donc essentiel, dès aujourd’hui, de travailler un plan d’actions sur mesure pour anticiper les exigences de la Directive et ainsi, bien se préparer.
Adapter sa politique de rémunération, évaluer l’équité de ses salaires, établir une méthodologie de pesée des postes, déployer de nouveaux outils, et sensibiliser les managers et les équipes RH sur le sujet … La mise en œuvre des actions peut nécessiter plusieurs mois.
Nous vous aidons à poser les bonnes questions pour optimiser dès maintenant vos pratiques de gestion des rémunérations. En bonus : à la fin de l’article, notre checklist à télécharger pour bien vous préparer !
Article rédigé par Sandrine Cara, Consultante RH chez Fortify
Transparence des salaires : de quoi parle t-on ?
Le principe d’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes est inscrit dans le droit européen depuis de nombreuses années. Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne impose à chaque État membre d’assurer l’application de ce principe pour un même travail ou un travail de même valeur.
Le droit français oblige déjà l’employeur à assurer, pour un même travail ou un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes (C. trav., art. L. 3221-2) et à publier chaque année un rapport sur leur « indice de l’égalité professionnelle femmes-hommes ».
Partant du constat que les femmes victimes de discrimination salariale ne disposent pas d’informations suffisantes pour faire reconnaître leurs droits, la Directive vise à renforcer les droits individuels à l’information et prévoit des mesures de transparence dès l’embauche, ainsi que pendant toute la relation contractuelle.
Les principales mesures de la Directive Européenne *
(*Information d’ordre générale qui ne constitue pas une consultation juridique)
La Directive Européenne sur la transparence des rémunérations repose sur 4 grandes mesures :
1. Transparence des rémunérations dès le début du processus de recrutement
- Tout candidat à un emploi dispose d’un droit de recevoir de l’employeur potentiel des informations sur la rémunération initiale associée au poste ou sur la fourchette de rémunération, réduisant ainsi les risques de discrimination dès le début de la relation contractuelle et garantissant une négociation de salaire éclairée.
Cette information peut être publiée par exemple dans une offre d’emploi ou bien remise au candidat. Qu’elle que soit la forme, l’employeur doit se ménager des preuves quant à l’information du candidat.
- Il n’est plus possible pour un recruteur de demander au candidat sa rémunération actuelle ou son historique de rémunération.
2. Transparence de la fixation des rémunérations et de la politique de progression de la rémunération
L’employeur doit mettre à disposition de ses collaborateurs, d’une manière facilement accessible, les critères utilisés pour déterminer la rémunération et leur progression.
Droits d’accès des salariés aux informations salariales :
- Les collaborateurs peuvent demander des informations sur leur niveau de rémunération individuel et sur les niveaux de rémunérations moyens, par sexe et par catégorie de leurs collègues pour le même poste ou accomplissant un travail de même valeur que le leur.
- L’employeur doit informer ses collaborateurs, une fois par an, de leurs droits à obtenir ces informations et apporter une réponse aux demandes des salariés dans un délai raisonnable et en tout état de cause dans un délai de 2 mois.
Afin de favoriser la transparence, nous vous recommandons de déployer un BSI (Bilan Social Individuel) pour offrir à vos collaborateurs une vue claire et détaillée de leur rémunération globale, grâce à un document récapitulatif à la fois synthétique et visuel.
3. Communication de l’employeur sur les écarts et les proportions femmes et hommes
Obligation des employeurs à communiquer plusieurs informations, notamment les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes, les proportions de femmes et d’hommes bénéficiant de composantes variables ou complémentaires, les proportions de femmes et d’hommes dans chaque quartile de rémunération.
Bon à savoir :
La Directive prévoit :
- une fréquence annuelle pour les entreprises comptant 250 salariés et plus
- une fréquence triennale pour les entreprises comptant 100 à 250
- une date d’application décalée pour les entreprises dont les effectifs comptent entre 100 et 149 salariés.
Elle précise que les états membres peuvent, en vertu de leur droit national, exiger des employeurs dont les effectifs comptent moins de 100 salariés qu’ils fournissent également des informations.
D’autres précisions pourront être apportées par la Loi Française d’ici au 7 juin 2026.
4. Renversement de la charge de la preuve
Dès lors que des faits laissent présumer l’existence d’une discrimination, l’employeur doit prouver qu’il n’y a pas eu de discrimination en matière de rémunération.
La directive prévoit l’organisation d’un régime de sanctions.
Quels sont les avantages de la transparence salariale ?
Outre l’objectif primordial d’éviter les inégalités et d’anticiper les risques de sanctions et de contentieux en matière d’égalité salariale, l’optimisation de la politique de rémunération et des avantages sociaux en faveur de la transparence offre plusieurs avantages stratégiques.
- Incarner les valeurs d’un employeur responsable et engagé dans des pratiques exemplaires : une politique de rémunération équitable et transparente est le reflet de valeurs d’équité, de respect et d’engagement.
- Maximiser l’efficacité des recrutements: en tant que levier pour attirer des candidats qualifiés et motivés, la transparence des rémunérations contribue à optimiser les pratiques de recrutement. L’attractivité et la crédibilité de l’entreprise est renforcée. La relation de travail commence sur de bonnes bases, favorisant une collaboration durable.
- Fidéliser les collaborateurs et enrichir leur expérience au sein de l’entreprise : montrer aux salariés que l’entreprise valorise l’équité et la transparence dans les pratiques salariales contribue à instaurer un climat de confiance et de justice, où les employés se sentent valorisés, reconnus et respectés.
- Stimuler la motivation et l’engagement des collaborateurs : le partage des pratiques en matière de rémunération permet aux salariés de mieux se projeter dans l’organisation et d’avoir une vision claire des opportunités d’évolution.
- Renforcer l’efficacité managériale : la responsabilisation des managers dans l’application de critères objectifs dans les décisions salariales consolide leur rôle et renforce leur crédibilité auprès de leurs équipes.
Comment se préparer à la directive ?
Plusieurs axes peuvent être explorés par l’entreprise pour s’assurer de disposer des arguments et outils nécessaires pour répondre aux exigences imposées par la Directive Européenne.
- Formaliser sa politique de rémunération et la faire comprendre : C’est en effet souvent l’incompréhension de la politique de rémunération qui pose problème. A l’inverse, lorsque les règles sont claires, les salaires et les décisions peuvent être objectivement expliqués, éliminant ainsi les rumeurs ou les malentendus.
Un tel document permet de partager avec les managers et les salariés les critères objectifs d’attribution des niveaux de rémunération et adaptés à chaque poste.
- Promouvoir des méthodes comparatives d’évaluation des postes : Il s’agit de méthodes de pesée des postes basées sur des critères adaptés à l’entreprise, tels que les compétences, les responsabilités, les niveaux de technicité, etc. Cela inclut également la mise en place de grilles salariales partagées, basées sur des études de marché externe et sur une cohérence interne au regard des qualifications, niveaux d’expérience, de responsabilité et de performance. La diffusion de ces grilles permet à chaque salarié de comprendre son positionnement et de se projeter.
- Disposer d’outils de gestion et historiser les informations: il est essentiel d’avoir des outils RH permettant de recueillir, analyser et suivre les rémunérations individuelles. Les logiciels de gestion des talents facilitent la mise en œuvre de procédures transparentes et des décisions éclairées. Les analyses permettent de s’assurer qu’il n’existe pas de disparités injustifiées et de repérer les écarts entre les postes similaires ou de valeur équivalente. La centralisation des données dans un même outil permet aussi d’historiser les éléments de justifications des décisions prises.
- Valoriser une culture d’équité salariale auprès des managers : les managers sont les premiers acteurs des décisions salariales. Sensibilisés aux enjeux de l’équité salariale et dotés d’outils adaptés aux spécificités des postes de l’entreprise, ils sont en mesure de prendre des décisions justes et cohérentes, et de les expliquer.
Optimisez votre politique de rémunération et préparez-vous à la la future directive
Fortify Advise vous accompagne dans la création ou la révision de votre politique de rémunération pour une gestion optimale, transparente et équitable de l’ensemble du package salarial de vos collaborateurs.
Voici quelques exemples de livrables que nous proposons dans le cadre de notre accompagnement :
- Diagnostic de l’offre de rémunération et des avantages sociaux actuels
- Stratégie de partage de la valeur et d’intéressement de vos salariés aux résultats de l’entreprise
- Benchmark et analyse comparative
- Stratégie d’harmonisation d’avantages sociaux
- Outils et processus de la politique de rémunération
- Analyse des impacts financiers